J’ai découvert ce titre par une critique mitigée de George (partagée par Sharon), une critique comme toujours bien argumentée et de plus fort intéressante car l’auteur elle-même a pu répondre de façon très constructive. J’étais déjà très tentée de me faire ma propre idée et voilà qu’une autre blogueuse que je suis régulièrement, Stéphie, nous livre un avis touchant. Il ne m’en a pas fallu plus pour me lancer dans cette lecture.
L’histoire se résume assez simplement : Joseph et Zita sont séparés après 56 ans de vie commune, ils doivent laisser leur maison en location, Joseph partant s’installer chez son fils à Montfort et Zita chez sa fille à Paris pour suivre un traitement pour le cœur. Ils s’écrivent tous les jours pour se soutenir et petit à petit apparaissent des failles dans leur bonheur qui semblait si parfait.
J’ai été très touchée par ce roman épistolaire, ce style m’avait déjà bien plu dans Le cercle littéraire des amateurs d'épluchures de patates. Je suis totalement entrée dans cette histoire et je dois dire que comme George, c’est le personnage de Joseph qui m’a bouleversée (et fait couler quelques larmes). C’est un homme qui, à 77 ans, pense avoir tout fait dans sa vie pour rendre sa famille heureuse, pour que sa femme et ses enfants ne manquent de rien et qui n’a pas vu certaines blessures qu’il découvre chez ses enfants devenus adultes. Il culpabilise de ne pas avoir réussi à avoir une maison bien à lui pour y finir ses jours avec sa femme qu’il aime plus que tout, de ne pas être assez fort pour s’en occuper seul. C’est un homme foncièrement bon qui ne voit pas le mal. C’est aussi lui qui fait le plus preuve d’ouverture d’esprit vis-à-vis de la famille recomposée de son fils, partageant une relation privilégiée avec Thomas, le fils de sa belle-fille. Après l’éclatement dramatique de sa famille, c’est encore lui qui continuera à vivre malgré tout et à découvrir de nouveaux horizons.
La relation entre Zita et sa fille Isabelle m’a par contre parue insupportable, avec des jérémiades des deux côtés et une fin qui m’a laissée perplexe. Hormis ce point là, j’ai beaucoup aimé ce roman, il s’étale sur une année, chaque saison débutant par un verset de ce poème de Sully Prudhomme que Frédérique Martin nous fait découvrir : « Le vase brisé »
Le vase où meurt cette verveine
D’un coup d’éventail fut fêlé ;
Le coup dut l’effleurer à peine :
Aucun bruit ne l’a révélé.
Mais la légère meurtrissure,
Mordant le cristal chaque jour,
D’une marche invisible et sûre,
En a fait lentement le tour.
Son eau fraîche a fui goutte à goutte,
Le suc des fleurs s’est épuisé ;
Personne encore ne s’en doute,
N’y touchez pas, il est brisé.
Souvent aussi la main qu’on aime,
Effleurant le cœur, le meurtrit ;
Puis le cœur se fend de lui-même,
La fleur de son amour périt.
Toujours intact aux yeux du monde,
Il sent croître et pleurer tout bas
Sa blessure fine et profonde ;
Il est brisé, n’y touchez pas.
Un très beau vase Médicis de chez Lylou Anne (j'ai découvert son blog et ses belles photos sur tumblr récemment: un enchantement!)
Roman qui a reçu le Grand prix littéraire de Villepreux 2012 (Challenge "A tous prix" chez Laure), challenge Petit bac 2013 chez Enna, catégorie "aliment/boisson"